Cybersanté: l’évolution lente suscite un intérêt croissant

Le DEP comme une opportunité pour une meilleure mise en réseau

InfoSocietyDays

Le Baromètre cybersanté est réalisé et établi depuis 2009 dans le cadre des InfoSocietyDays. Sont interrogés aussi bien les professionnels de santé que la population résidente. C’est chaque fois l’occasion d’examiner à fond l’état actuel et l’évolution de la cybersanté en Suisse. Ce rapport présente les résultats de la population résidente.

En adoptant la loi fédérale sur le dossier électronique du patient (DEP) en juin 2015, le Parlement a posé un jalon législatif dans l’implantation de la cybersanté en Suisse. Les communautés (de référence), les futurs fournisseurs de DEP, sont actuellement en cours de constitution. La Confédération et les cantons estiment que le DEP sera disponible dans toutes les régions de Suisse à partir du printemps 2020. L’introduction du DEP est complexe et nécessite la coopération de nombreux acteurs de la santé.

À beaucoup d’égards, le DEP représente le fer de lance des efforts de cybersanté en Suisse. C’est pourquoi ce thème est traité avec une attention particulière dans le Monitor. L’étude s’inspire de la «Stratégie Cybersanté Suisse» et d’enquêtes de base de la Commission européenne sur la surveillance de la cybersanté. Le Baromètre cybersanté suisse est co-parrainé par les partenaires suivants:

Partenaires principaux: Office fédéral de la santé publique (OFSP), FMH

Co-partenaires d’étude: CURAVIVA Suisse, pharmaSuisse, eHealth Suisse, Aide et soins à domicile Suisse, Fondation Careum, Caisse des médecins, Direction de la santé du canton de Zurich, Département de la santé du canton de Saint-Gall, groupe d’intérêt eHealth

L’infobox à la fin du cockpit renferme des détails concernant l’échantillonnage et la méthodologie.

Sources d’informations et utilisation des offres électroniques

En 2013, une petite majorité de 56 pourcent des personnes autorisées à voter en Suisse indiquait qu’elles se renseignaient au sujet de thèmes de santé sur Internet. Elles avaient, à l’époque, nettement plus souvent recours à cette fin à des médias classiques comme les quotidiens, les revues ou la radio et la télévision (75% respectivement 71%). C’est aussi en 2013 qu’Edward Snowden a révélé que les services de renseignement américains surveillaient des flux de données en masse.

Ces révélations ont entraîné une hausse du scepticisme vis-à-vis d’Internet et marqué une rupture dans la progression de l’ère numérique. Également mue par la transformation croissante des médias, l’importance d’Internet dans le domaine des thèmes de santé a connu une nouvelle hausse continue à partir de 2016 et atteint un nouveau record en 2019.
Aujourd’hui, Internet est une source d’informations aussi importante que la radio pour ce qui est des questions de santé.

L’importance croissante d’Internet comme source d’informations s’accompagne d’une hausse de la connaissance des applications électroniques dans le domaine de la santé. Les offres dans le domaine du fitness et du mouvement ainsi que les applications d’appel d’urgence jouent un rôle pionnier à cet égard. En termes de popularité, elles se démarquent de plus en plus nettement, au fil du temps, d’autres applications comme par exemple les applications mesurant la glycémie, rappelant la prise de médicaments ou permettant d’enregistrer une carte électronique de donneur d’organes.

Mais les degrés de popularité des applications mesurés en 2019 sont nettement supérieurs à ceux de la première période de mesure en 2015, à l’exception des offres d’identification de maladies et d’allergies qui ne peuvent pas vraiment avoir un impact étendu.

Les personnes qui sont au courant d’une application peuvent dans la plupart des cas aussi s’imaginer l’utiliser à l’avenir ou l’utilisent déjà. Ici aussi, la disposition à utiliser ces applications augmente nettement, dans la plupart des cas, au fil des cinq périodes de mesure examinées.

Les applications permettant d’identifier les maladies et les allergies ne sont pas seulement les applications les moins connues, mais ce sont aussi les seules offres à avoir enregistré un recul de la disposition des gens à les utiliser. À la différence d’une application comme les directives anticipées du patient en ligne, qui ont principalement un caractère de dépôt électronique d’informations, l’identification de maladies est associée à des conséquences concrètes comme par exemple la prise de médicaments ou le commencement de certaines thérapies. Il est apparent que les gens ne font actuellement pas beaucoup confiance au fonctionnement d’une application à cette fin.

Échange électronique entre patientes et patients et professionnels de santé

Internet ne joue pas seulement un rôle de plus en plus important comme source d’informations ou dans la fourniture d’applications de santé mais influence aussi l’échange entre professionnels de santé et patientes et patients. Les formes d’échange en ligne entre le personnel traitant et les personnes traitées ne revêtent cependant pas toutes la même importance aux yeux de la population.

Cette dernière accorde en effet une importance plus grande à la possibilité de prendre rendez-vous en ligne chez le médecin ou de demander une ordonnance sur Internet.

Aujourd’hui, 69 et 67 pourcent de la population indiquent que ces deux facteurs leur sont très ou plutôt importants lorsqu’il s’agit de choisir leur médecin. La possibilité de communiquer avec le médecin par mail, SMS ou WhatsApp, de pouvoir tirer au clair sur Internet quand un traitement est nécessaire ou de déclencher un appel d’urgence n’est par contre pas une priorité.

La possibilité de consultations en ligne au lieu des consultations en personne chez le médecin n’importe par contre qu’à environ 30 pourcent de la population.

La disposition de la population à partager ses propres données avec les professionnels de santé augmente proportionnellement à la hausse des exigences posées par ces derniers à la connectivité numérique. C’est particulièrement vrai pour les personnes de confiance hautement spécialisées comme les médecins de famille, les médecins traitants ou les pharmaciens.

La disposition de la population à permettre à des professionnels de santé non précisés de consulter ses données propres est légèrement inférieure, mais plus de 60 pourcent se déclarent ici aussi d’accord.

La hausse claire de l’approbation en faveur des pharmaciennes et pharmaciens, qui passe de 60 pourcent en 2016 à 82 pourcent en 2019, est particulièrement frappante. Le saut très net entre 2017 et 2018 s’est produit en même temps que le changement de méthode de sondage (des personnes autorisées à voter aux habitants). L’analyse séparée des deux groupes montre cependant que ce n’est pas la raison de la hausse. Elle pourrait donc s’expliquer par la révision de la loi sur les produits thérapeutiques et l’élargissement des compétences des pharmacies qui en a résulté.

L’évaluation présentée ci-dessous montre que l’importance croissante des solutions numériques dans le système de santé est fortement influencée par les jeunes générations. Les membres de la génération Y, nés entre 1980 et 2000, ont donc aujourd’hui entre 18 et 39 ans.

Cette cohorte a fait preuve d’un scepticisme particulièrement grand à l’égard de la protection des données après 2013.

La part de personnes se déclarant d’accord avec l’échange de données entre personnes traitantes a baissé par la suite, passant de 72 pourcent à 45 pourcent en 2017. Mais on enregistre de nouveau depuis lors une hausse tout aussi grande sur un laps de temps très court.

Les changements d’attitude envers l’échange de données étaient nettement moins marqués pendant ce temps dans les cohortes des plus de 40 ans (génération X et baby boomers).

Attitudes envers le DEP

Une majorité de 78 pourcent de la population suisse considère jusqu’à présent que le dossier électronique du patient est une bonne chose, ce qui représente une hausse de 9 pourcent par rapport à 2018.

Le camp des sceptiques ne se rétrécit pas mais ceux qui étaient indécis jusqu’à présent (ne sait pas/pas de réponse) commencent à former une opinion.

Pour la première fois en 2019, une majorité de 55 pourcent de la population ouvrirait et utiliserait elle-même un DEP.

La part s’élevait encore à 34 pourcent en 2015; la disposition à utiliser le DEP augmente graduellement depuis 2016.

Comme avant, la plus grande partie de la population aimerait ouvrir son dossier électronique du patient chez le médecin de famille. 68 pourcent des personnes indiquent actuellement qu’elles ouvriraient un DEP de leur propre initiative ou sur la recommandation d’un professionnel de santé.

En accord avec l’importance croissante d’Internet dans le domaine de la santé, de plus en plus d’habitantes et d’habitants de Suisse peuvent aussi s’imaginer ouvrir un DEP en ligne. Cette valeur est certes nettement à la traîne par rapport à celle des personnes qui souhaitent ouvrir leur DEP au cabinet de leur médecin de famille – mais elle a presque doublé par rapport à 2016.

Fonctions souhaitées du DEP

La population souhaite certaines prestations complémentaires en plus du dossier électronique du patient. On citera en premier lieu la possibilité de prendre rendez-vous chez le médecin de famille ou des spécialistes, puis l’obtention d’informations de santé sur Internet et une fonction de rappel de prise de médicaments.

Ces trois fonctions trouvent des adeptes au fil du temps. La population est par contre moins réceptive à d’autres possibilités comme une sélection d’applications de santé, des plateformes d’échange avec les patients ou la fourniture de conseils par des groupes d’intérêt. L’exigence des autres fonctions électroniques montre que la population ne souhaite pas un mélange hétérogène d’offres mais met l’accent sur des offres centrales et des procédures de suivi des patients.

La disposition de la population à enregistrer des données dans le dossier électronique du patient augmente depuis 2016. C’est vrai pour tous les domaines couverts par le sondage à l’exception des données d’applications de santé et de fitness où l’on observe la tendance contraire.

À l’instar des fonctions complémentaires souhaitées, la disposition à enregistrer des données dans le DEP révèle aussi que la population met l’emphase sur l’essentiel. Le DEP ne devrait pas, à ses yeux, se concentrer sur des choses qui sont associées plutôt aux loisirs qu’à la maladie.

Première lecture

Acceptation de l’avenir numérique

Après 2013, un grand sentiment d’inquiétude s’est propagé concernant la question de la protection des données. Les conséquences des révélations d’Edward Snowden aux États-Unis étaient aussi perceptibles en Suisse. Les données sont particulièrement sensibles et personnelles dans le système de santé, ce qui a aussi laissé des traces dans le Baromètre cybersanté suisse. Mais la disposition à miser à l’avenir aussi sur des solutions numériques dans le domaine de la santé a nettement augmenté depuis 2016. Le creux de la vague de la disposition numérique est franchi, la population accepte largement le fait que l’avenir est numérique – dans toutes les sphères de la vie.

Une majorité ouvrirait et utiliserait un DEP

Le dossier électronique du patient gagne graduellement des adeptes. Des pans de plus en plus grands de la population considèrent comme judicieux un enregistrement électronique de leurs propres informations et peuvent s’imaginer créer eux-mêmes un DEP. Il leur importe que l’accent soit mis sur l’essentiel. Ils veulent une solution sérieuse entérinée par les autorités qui soit aussi irréprochable en matière de protection des données. Il faut séparer les loisirs de la maladie. Associer le DEP à des applications qui ne sont pas obligatoires pour le traitement n’est pas une priorité pour la population.

La disposition à transférer ses propres informations à la sphère numérique est en hausse

Bien que la population estime que les applications dans le domaine des loisirs ne doivent pas nécessairement être associées au DEP, elles restent les pionnières de la numérisation dans la santé. Les solutions numériques ont longtemps servi principalement à l’amusement et au divertissement. Il n’y avait en revanche pas beaucoup d’applications soutenues effectivement par les autorités mais cela change de plus en plus. Le gouvernement et l’administration proposent davantage de solutions numériques, même dans des domaines sensibles comme la santé ou les finances (p.ex. déclaration fiscale en ligne), ce qui accroît la confiance et la disposition à passer au numérique.

La génération Y comme moteur

On parle pour la première fois, en rapport avec la génération Y, de natifs numériques. Les membres les plus vieux de la génération Y ont maintenant tout juste la quarantaine et représentent environ un tiers de la population. Alors que la génération X et les baby boomers ont plutôt du mal à passer au numérique, les membres de la génération Y sont des moteurs clés de cette évolution. Il y a cependant aussi, en 2019, un nombre record de personnes âgées de plus de 65 ans, soit 68 pourcent, qui se déclarent d’accord avec l’échange de données électroniques entre leurs professionnels de santé traitants. Il faut aussi garder cela à l’esprit pour la conception et la communication au sujet du DEP.

Détails méthodologiques

Client: InfoSocietyDays

Population: population résidente de Suisse (jusqu’en 2017, personnes autorisées à voter)

Région concernée: toute la Suisse

Origine des adresses: annuaire de téléphone de Swisscom (pool)

Collecte des données: téléphonique, assistée par ordinateur (CATI)

Type d’échantillonnage: aléatoire

Période concernée: du 3 au 12 janvier 2019 (date médiane de sondage: le 7 janvier 2019)

Taille de l’échantillon: minimum 1200, effectivement 1200 (nDCH: 700, nFCH: 300, nICH: 200)

Marge d’erreur: ± 2.9 pourcent pour 50/50 (et probabilité de 95 pourcent)

Caractéristiques des quotas: âge/sexe interlocked

Pondération sur base de: langue

Durée du sondage: moyenne 20.0 minutes (+/-4.1 minutes)